Moi, mon métier, les dents et les bouquins...
Dans la vraie vie, même si, au premier abord, on ne voit pas le lien avec les bouquins pour les gosses, je suis dentiste. Je mêle mes activités professionnelles et mes loisirs, à travers une collection riche et variée de livres pour enfants, dans lesquels il est question de dents, et de dentistes. J'adore ça ! J'y ai même consacré des travaux universitaires.
Voici les dernières arrivées de ma collection ... dont vous pouvez avoir un aperçu du reste par
ICI.
Dans la nouvelle collection Les Histoires de la récré, après la maîtresse, c'est le dentiste qui en prend pour son grade, avec Mon dentiste n'aime pas l'ail de Éric Chevreau et Grégoire Mabire. Ce n'est pas avec un petit roman, pour lecteurs débutants, de ce genre, qu'on va pouvoir mettre fin aux charmants préjugés du dentiste qui soigne les enfants. (D'ailleurs vous avais-je préciser que j'étais dentiste pédiatrique ?!...)
C'est un classique, dans les ouvrages pour les enfants, l'opposition entre le dentiste-monstre et l'acteur de la prévention bucco-dentaire. Le dentiste n'a pas bonne réputation , mais il est difficile de s'en passer, quand on a un problème dentaire. D'habitude, tout commence avec un enfant qui a besoin d'aller chez le dentiste, sans en avoir le choix. Il s'imagine le pire, tous ses copains lui racontent des séances affreuses chez le dentiste. Puis au milieu de l'histoire, on voit un retournement de situation, tous les points négatifs imaginés/fantasmés par l'enfant, se confrontent à la réalité qui n'est pas si terrible. Le
Happy End est synonyme de dent soignée et de sourire retrouvée.
Dans Mon dentiste n'aime pas l'ail, tout le début correspond à ce schéma classique, on a bien la salle d'attente lugubre, le fauteuil dentaire représenté par une chaise de torture avec des clous, le dentiste monstrueux aux dents de vampire, mais pour ce qui est de la dent soignée ... Rien du tout.
Bref, je n'en dirai pas plus ni sur la fin de cette histoire, ni sur les questions de lecture (quel est leur intérêt?!), ni sur mon agacement. Certes l'histoire peut être drôle, certes l'illustrateur a fait un travail de recherche dans la représentation du cabinet dentaire, certes je critique aussi les histoires de dentiste trop édulcorées, mais j'aurai bien aimé une allusion à la raison du besoin de soins dentaires. Où est le brossage quotidien (de plus d'1 min bien sûr!) ? Où sont les bonbons engloutis ? Où sont les parents qui disent que l'eau est imbuvable sans grenadine dedans ?
Si je n'étais pas dentiste, je dirai que ce petit roman est drôle, qu'il pourra faire rire le jeune lecteur débutant. Mais je suis dentiste ...
Quand je vois qu'il y a un risque de carie, de transformation imminente en vampire de ma part, je sors mon arme absolue ... La Brosse à Dents ! Comme je le dis aux enfants, personnellement je n'ai pas de baguette magique, ni de programme d'autonettoyage, il n'y a que eux et leurs petits muscles pour combattre les microbes et éviter les caries. Et quand la carie est là, et bien ... On fait. Y a-t-il le choix ?
Merci à cette jeune patiente qui après s'être fait rappeler que la brosse à dents n'allait pas toute seule nettoyer ses dents, m'a envoyé la preuve de sa motivation.
D'ailleurs puisqu'on parle de brosse à dents ...
Des propositions poétiques et artistiques autour de cet objet du quotidien
(au sens propre du terme!), dans ce livre en accordéon, qui se déplie, se tourne et s'observe dans tous les sens,
La Brosse à dents de Polina, édité par
Le bleu des étoiles. Des jeux de mots bien trouvés, quelques allusions sur le bon usage de la brosse à dents, un bel objet. Voici un livre qui me fait regarder ma brosse à dents autrement et c'est plaisant.
Tout commence par un Si je ne me brossais jamais les dents ... Et tout finit par Si tu ne veux pas sentir la sardine, brosse-toi les dents régulièrement.
Évidemment avec ces deux phrases, en tant que dentiste je suis comblée, mais ce n'est pas ce qui m'a ravie le plus. Le plus drôle ce sont les 20 pages entre ces deux phrases, toutes les situations imaginées par l'auteur, auxquelles on ne s'attend pas du tout. Aviez-vous déjà pensé que l'on pouvait faire un pull en poils de brosses à dents ? Des illustrations dynamiques pour ces situations déjantées. Un très bon ouvrage, pour mon côté dentiste et mon côté amatrice de livres pour enfants.
Et oui je suis d'accord
"Pour éviter les dents en or, utilise SuperFluor" !
Pendant que je lisais cet album, La Petite Souris m'a envoyé une carte postale de Chine....
Pauline Jubert et Lilli English, dans La Petite Souris et l'Empereur de Chine, mêle tradition chinoise et légende de Petite Souris, pour une histoire originale. Malgré quelques longueurs dans le texte, j'ai aimé ce mélange des genres. Les origines de la Petite Souris peuvent être partout.
Pour finir de vous convaincre que les dents, c'est important ...
Deux histoires dans lesquelles les personnages ne sont pas pris au sérieux, à cause de leurs problèmes dentaires. Ils devront montrer leur autorité autrement qu'avec leurs dents.
Deux ambiances très différentes, deux raisons différentes de ne plus avoir de dent(s), mais deux histoires très appréciées.
J'ai aimé le courage et l'audace de Charlie, les décors du Far West, la représentation des animaux.
J'ai aimé les couleurs de la jungle, le rythme de l'histoire, l'arrogance d'Ali et sa détresse ensuite.
Les dents de la jungle de Jarvis, Milan, 2016.
Charlie de Quentin Gréban, Mijade, 2015.
Si vous avez lu des histoires croustillantes de dents et de dentistes, même si vous savez qu'elles ne plairont pas à mon côté dentiste, parce qu'il y a beaucoup trop de bonbons et de caries dedans, n'hésitez pas à partager vos trouvailles en commentaire, parce qu'il arrive que je passe à côté de pépites.